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Holden Caulfield
22 juillet 2020

Le bus de 17h12

J'avais passé une journée épuisante, trop d'appels, de réunions, de courriers, je n'en pouvais plus, je voulais changer de vie, je voulais écrire un roman. Je pensais à ça quand je l'ai vu. Ce garçon dans le bus, j'étais juste derrière lui, debout. Je voyais sa chemise épouser les contours de ses épaules, ou l'inverse, et le pantalon noir, droit, qui remonte les fesses, qui arrive aux chevilles, qui laisse voir les chaussures de ville soigneusement cirées. Ce garçon, lycéen sans doute, m'a émue par sa jeunesse et sa candeur. Quand je suis sortie du bus, j'ai abandonné l'idée du roman, et j'ai suivi le garçon.

 

Il marchait d'un pas très tranquille, je devais me forcer à ralentir pour garder une certaine distance entre nous. Il a longé l'avenue Carnot, au carrefour de la boulangerie il est passé au feu rouge alors que les voitures s'élançaient, j'ai dû m'arrêter, je l'ai perdu. Chaque jour, chaque semaine, je reprenais le bus de 17h12, mais je ne l'ai plus jamais revu.

 

J'ai repensé au temps où j'étais moi-même lycéenne, quand chaque rayon de soleil me semblait destiné, quand je me sentais promise à un avenir exceptionnel.

 

J'ai imaginé ses parents, plutôt riches vu la maison (et les chaussures!), endettés sur trente ans mais ça vaut le coup. Le carrelage dans la cuisine, le bureau qui sert surtout de débarras, les volets fermés en été, la belle vaisselle du dimanche. Je l'ai imaginé lui, un peu gauche, me montrant sa chambre. Et je suis rentrée, pour enfin le commencer, ce livre.

 

 

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