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Holden Caulfield
18 mai 2014

Holden et moi.

Lorsque le jour a inondé la maison, j'étais déjà réveillée depuis longtemps. J'ai entendu la porte claquer quand il est sorti. Je suis restée dans le lit. Au début j'ai allumé la lumière et regardé la chambre. Il n'y avait pas une photo, un vêtement qui traîne, rien qui indique la présence d'un être humain. J'ai tiré la couette sur ma tête. J'ai éteint, après, pour y voir plus clair. J'ai essayé de deviner la couleur du ciel à travers le mince filet de lumière que permettait le volet en bois. Quand je suis enfin descendue, j'ai bu un peu de café, j'ai cherché un mot qu'il m'aurait laissé, « pars quand tu veux » ou « laisse les clés dans la boite aux lettres quand tu t'en vas », mais il n'y avait rien. Je me suis demandée à qui était cette maison. Sûrement pas lui, vu son âge, et son air. Je n'ai pas laissé de mot non plus. Je suis partie en mettant les clés sur la porte.

Quand je suis sortie, la terre était noire, et les flaques n'avaient pas encore séché. Il pleuvait, une pluie très chaude, une pluie d'été. J’ai erré dans les bois, les gouttes d'eau coulant sur mes cils. Je ne savais plus quel chemin nous avions pris, quelle était la route pour retourner en ville. Les feuilles séchées crissaient sous mes pieds. Je me suis accroupie. J’ai écarté les feuilles, j’ai pris un peu de terre mouillée entre mes mains. Je l’ai sentie. Je l’ai apportée à ma bouche et l’ai mangée. J’ai collé mon visage au sol. Il s’est ouvert en deux et je me suis fondue en lui. Mes muscles étaient devenus boue, mes os des branches et mes ongles des pierres.

J’ai couché avec Holden. Il m’a apostrophée dans la rue. Je l’avais déjà vu plusieurs fois, dans le même bar. Il se rappelait de mon prénom. Nous sommes allés chez lui, une maison perdue au fond des bois. Je l’ai regardé dans les yeux quand, allongé sur moi, il me pénétrait. Si vous aviez vu son regard. Holden demeure inconsolé. Il ne m’en a jamais touché mot, mais je le sais. Les tourments grondent sous son corps d'enfant.

 Je suis la terre et il est l’orage.

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